12ème Raid Passion Désert - Le Dakar du peuple



Pour vous mettre dans le bain du Raid Passion Désert – Nous vous conseillons ce reportage de David Zimmermann. Publié sur le site acidmoto.ch. Bravo pour ce récit et pour notre Passion …
Récit et photos David Zimmermann - Raid Passion Desert 2016


Dix jours de conduite pour une boucle de près de 3'000 km au départ de Marrakech et passant par Skoura, Midelt, Erfoud, Merzouga, Zagora, Ouarzazate. Près de 200 participants (50 motos, 16 RZR et 55 voitures), le Raid Passion Désert est une aventure exceptionnelle pour tous ceux qui rêvent du Dakar.
Après trois participations au Tuareg Rallye, je comprends enfin que le Rallye est au-dessus de mon niveau et de mon budget également. Enfin, pas encore tout à fait puisque cela ne pas pas empêché d’acquérir une KTM 690 Rally Factory, moto bien trop lourde pour mes frêles biscoteaux, mais ô combien rare et mythique... A la recherche d’un terrain de jeu où l’utiliser, j’entends par hasard parler du Raid Passion Désert par des potes et le concept me séduit immédiatement.
Le Raid Passion Désert, c’est comme un rallye, avec de la navigation, un roadbook, des étapes atteignant 400km par jour et 10 jours de pilotage. Mais tout ça dans une ambiance bon enfant, car ce n’est pas une course de vitesse et ça tombe bien puisque justement, la vitesse c’est pas mon fort.
Après un départ en catastrophe de Suisse où comme un con je réussis à oublier mon téléphone à côté des toilettes, j’atterris à Marrakech et je rejoins l’hôtel après avoir bien entendu payé trop cher mon taxi... Il y a déjà beaucoup de monde sur place et je fais connaissance avec les autres Suisses qui sont déjà tous ici. Il est très étonnant de constater que sur un événement francophone, la majorité des participants suisses viennent de la partie alémanique. Parmi les motards, il y a Werni, Chris et Alex que je connais déjà, Léo et Michael et en voiture Gabi et Marcel. Il nous faudra trois jours pour repérer le seul autre Romand, Alain, qui en fait vit en Espagne et du coup n’a pas une plaque suisse sur sa moto.
Je récupère ma caisse et mon sac, transportés par l’organisation avec ma moto depuis Mulhouse et par la même occasion je réalise que je dois être le seul gars à être venu avec plus de filtres à air que de calebards ! Je croyais les avoir mis dans le sac qui est parti avec ma moto une semaine avant mon vol, mais non... Heureusement qu’un petit doute ce matin m’en a fait embarquer un de réserve. J’aurai donc plus de service de caleçon que de filtres à air à faire, mais au final ce n’est pas plus mal, parce que le filtre à air, il faut encore l’huiler après l’avoir nettoyé.
De son côté, l’organisation a également connu quelques sueurs froides, puisqu’en arrivant sur place ce weekend, après 50 heures de ferry, ils apprennent qu’ils doivent modifier complètement le tracé des deux premières journées pour cause de visite du roi dans la région...

 

Etape 1: Marrakech-Skoura 250 kilomètres

Le départ de la première étape est donné à 08h0. Je roule avec le trio suisse Chris, Werni et Alex, tous trois en KTM 690 Enduro équipée du kit Quest de KTM Basel. Ce sont mes premiers kilomètres au guidon de la 690 Rally, j’apprends à la connaître et ça se passe plutôt bien, les pistes étant bien roulantes et pas trop techniques pour l’instant. La position de conduite debout est exceptionnelle, par contre les suspensions sont vraiment dures...
On traverse des plaines verdoyantes avant de s’attaquer à la montée de l’oued Tessaoud où on franchit un col à près de 2’700m d’altitude. En fin de journée nous attend le premier challenge, une longue piste dans un oued où on va devoir traverser une rivière qui serpentine à de nombreuses reprises. On nous avait promis qu’on aurait les pieds mouillés ce soir, c’était vrai ! Ici, le poids de la Rallye se fait sentir et surtout son embrayage ultra dur, mais ça passe quand même.
En fin d’après-midi, nous arrivons dans un camp nomade à Skoura où nous attend un apéro suivi du souper. Une grande partie des 60 bénévoles de l’organisation viennent du sud de la France, c’est donc bien évidemment avec du Pastis que l’on trinque. Nous dormons tous sous de grandes tentes de toile, c’est bien sympa.

Etape 2 : Skoura-Midelt 400 kilomètres

Départ à 07h15 avec les bottes encore mouillées de la veille pour une très longue étape de 400km qui commence dans la vallée du Dadès jusqu’au col Tizi n’Ouano à plus de 2’900m d’altitude. Nous traversons la barrière de l’Atlas et les paysages sont à couper le souffle. Occupé à suivre tant bien que mal le rythme de mes compatriotes, je n’ai même pas eu le temps de dégaîner mon appareil photo une seule fois. Aucune difficulté à signaler sur les 300 premiers kilomètres puisque c’était de la route. Sur les 100 derniers kilomètres, les choses se corsent, avec un oued bien trialisant qui va nous faire mouiller les bottes (et les aisselles) à de nombreuses reprises et pour finir, cerise sur le gâteau, le magnifique canyon de Jaffar.
Ma première chute aujourd’hui, je perds l’avant dans un virage et me retrouve au sol sans me faire mal, mais en laissant de belles griffures sur les réservoirs hors de prix de ma chère moto.
Arrivé à Midelt après une très longue journée, je commence par me commander une bière et une frite avant de m’attaquer à la mécanique. Les journées sont chargées et mon téléphone ne me manque plus vraiment. Impossible de trouver un câble de remplacement pour mon tripmaster qui déconne depuis le début du raid, je vais devoir utiliser le compteur kilomètre du GPS, sans pouvoir faire de correction. Tous les soirs sur le bivouac un camion atelier est présent avec trois jeunes apprentis mécanos et leur prof, qui sont là pour donner un coup de main à qui en a besoin. Si ce n’était pas assez, on a même droit à un service d’hostéopathes gratuit, avec quatre étudiants en dernière année. C’est du grand luxe !

Etape 3 : Midelt-Midelt 313 kilomètres

Aujourd’hui, changement de décor radical. Les paysages montagneux laissent place à des forêts en début de journée. Depuis le premier jour, mes coéquipiers ont tous choppé la tourista à tour de rôle et ont dû procéder à quelques vidanges d’urgence au bord de la piste... Ma hantise absolue ! Essayez de descendre vos pantalons quand vous avez des bottes de motocross, des protection de genoux et un short de protection sur votre calebard !
Moi je croise les doigts en ingurgitant du Bioflorin matin et soir préventivement, mais pour l’instant tout va bien. J’aurais pu faire des photos très drôles mais je n’ai pas osé de peur que le destin se retourne contre moi...
Sur un raid, comme sur un rallye, il y a des checkpoints qui valident que l’ont soit passé au bon endroit. Sur un rallye, les gens n’ont pas deux secondes à perdre et se ruent pour faire tamponner leur carte et repartir aussitôt. Ici, comme il n’y a pas de contrainte de temps, l’ambiance est cool. On est attendu avec du café, thé et des petits biscuits et la plupart des participants s’arrêtent pour faire un brin de causette. C’est l’occasion de faire plus ample connaissance avec les autres car le reste du temps je roule toujours avec les mêmes personnes.
Après un gros passage à gué, la moto d’Alex commence à poser des problèmes. A de nombreuses reprises, son moteur cale dès qu’il ouvre les gaz. Nous rejoignons vers 17h00 le checkpoint où l’on doit prendre le départ pour la dernière spéciale avant 17h30, faute de quoi, nous devons rentrer par la route. Après moins d’un kilomètre, la moto d’Alex ne veut plus rien savoir, on commence à démonter les réservoirs pour atteindre la bougie, tout semble fonctionner correctement, mais toujours le même problème, elle cale dès qu’on ouvre les gaz. Finalement, sur le coup des 17h30, Alex décide de retourner au checkpoint pour voir s’il peut avoir de l’aide et rentrer par la route.
De notre côté, on se dépêche d’attaquer la dernière boucle qui passe dans un magnifique canyon avant de rejoindre l’hôtel. Alex est déjà sur place quand on arrive, sa moto a finalement bien voulu partir après qu’il ait soufflé avec de l’air comprimée dans le capuchon de bougie.
Mauvais calcul de ma part que de vouloir finir le Michelin Enduro qui équipait la roue avant de ma moto à l’achat... En trois jours, il s’est complètement consommé au milieu, et ce soir en arrivant au camp, je n’ai pas eu d’autres choix que d’acheter et faire monter un nouveau Michelin Desert. Et paf, € 150.- dans les dents...

Etape 4 : Midelt-Erfoud 303 kilomètres

Une journée non pas éprouvante par sa difficulté technique, mais surtout par la poussière, qui nous oblige à laisser beaucoup d’écart encore les véhicules si l’on veut y voir quelque chose. Aujourd’hui, j’ai décidé de rouler seul, afin de la prendre un peu plus cool, parce que pour suivre mes compatriotes je dois vraiment rouler au max de mes capacités, et eux m’attendent toujours, et même s’il ne m’ont jamais fait une remarque, ça me met la pression, parce que je n’aime pas être à la traîne.
Nous passons à travers des villages de montagne isolés de tout, probablement sans eau courante ni électricité, où les nombreux enfants sont toujours très enthousiastes au bord de la route. De temps en temps, il y en a un ou deux qui nous balancent quand même des cailloux, mais c’est assez rare, heureusement.
La fin de l’étape d’aujourd’hui se fera dans un ouède de 15km, vraiment pas facile. Et comme bouquet final, nous passons au travers d’une magnifique ville minière abandonnée où j’aurais bien passé quelques heures à faire des photos.
Après quatre jours, la routine commence à se mettre en place. Dès qu’on arrive au camp, il faut commencer par aller chercher ses affaires dans le camion, poser son sac dans la chambre, s’occuper de la moto (plein d’essence, service du filtre à air, réparations et contrôles divers), préparer le roadbook, aller au briefing et finalement au souper. Vers 23h00, on est en général prêt pour aller se coucher.

Etape 5 : Boucle Erfoud 218 kilomètres

L’étape 5 fut pour moi la plus éprouvante du raid. Le départ est donné à 07h00, afin d’éviter au maximum les fortes chaleurs. Après une liaison de 30km, nous voilà au pied des dunes avec au choix, la grande boucle ou la petite. Interdiction de rouler seul, je réintègre mon team, qui bien évidemment choisi de faire la grande boucle...
Rapidement, au détour d’une dune, Alex trouve un participant inconscient à côté de sa moto. Il s’est pris un monticule d’herbe à chameau et s’est fait éjecté. On appelle l’assistance médicale et on attend leur arrivée avant de continuer dans les dunes, avec une température qui dépasse déjà les 35°C. Bien qu’après l’accident il semblait vouloir continuer, on apprendra par la suite que le malheureux a été rapatrié en France, blessé à la cage thoracique.
Contrairement aux voitures, les motos peuvent se permettre d’attaquer les dunes de face, en suivant le cap entre les points GPS pour minimiser la distance. Toutefois, c’est toujours délicat de s’arrêter au bon moment au sommet. Pas assez de gaz et on se retrouve avec la roue arrière enterrée, ce qui nécessite de coucher la moto, la retourner, descendre et remonter la dune. Si on est un peu trop optimiste avec les gaz, on peut se retrouver à passer par-dessus la moto en passant son sommet, car, de l’autre côté ça descend souvent de façon abrupte. C’est toute une technique, et je dois dire qu’avec la Rallye, c’est bien plus difficile que quand je l’ai fait avec mon enduro, qui pesait 40 kg de moins.
En plus de la difficulté physique, on a aussi quelques soucis mécaniques, avec tout d’abord une panne rapidement résolue sur la moto de Werni. Un raccord rapide d’essence s’est déconnecté. Peu de temps après, suite à une chute, la moto de Chris refuse de démarrer, la batterie semble morte.
Il faut la ponter avec une autre moto, mais on n’a pas de câbles et on se trouve au milieu des dunes. Par une chance inouïe, à quelques mètres de sa moto se trouve un puit d’eau inachevé. On réussit à casser deux fers à béton qui pointaient vers le ciel en les pliant et dépliant, et on essaie de ponter sa batterie avec la moto de Werni au moyen de ces fers pliés... ça ne fonctionne pas immédiatement, mais après quelques tentatives sa moto démarre. Autant vous dire qu’on n’est pas peu fiers sur ce coup, de vrais McGyver. La moto fume énormément et il semblerait que suite à la chute il y ait eu de l’huile qui soit remonté dans le cylindre.
Quand on atteint le premier checkpoint, je suis déjà sur les rotules. J’ai usé quasiment toutes mes ressources pour désensabler à de nombreuses reprises ma lourde moto. Après une pause de 20 minutres, on repart. J’en chie un max, je n’arrive même plus à rouler debout tellement je suis exténué, et on est encore pas près d’arriver.
Quand finalement on franchit la ligne d’arrivée, je suis à peine capable de descendre de la moto. Heureusement, aujourd’hui, on dort dans le même hôtel qu’hier, donc pas besoin d’aller chercher les affaires. L’autre bonne nouvelle, c’est qu’on arrive tôt, vers les 15h00, et après une bonne douche, je profite de dormir deux heures avant de m’attaquer à la mécanique et la préparation du roadbook de demain.
A la tombée de la nuit, deux participants dont le Genevois Alain, ne sont toujours pas rentrés. L’organisation nous communique qu’ils les ont retrouvé et qu’ils sont en train de les rapatrier au camp. Ils se sont égarés et retrouvés sans eau ni essence, ni réseau téléphonique. Grâce à la balise de détresse SPOT, l’organisation les a retrouvés, mais ce n’était pas gagné parce qu’ils ont bougé après l’avoir déclanchée. Pour empirer la situation, ils se sont même séparés. Mais tout est bien qui finit bien puisqu’avant minuit ils sont les deux de retour.

Etape 6 : Erfoud-Zagora 354 kilomètres

Cette journée du 1er mai, je m’en souviendrai toute ma vie. Je pars seul, et ça ne commence pas très fort pour moi. Je galère un max sur les pistes de sable mou et profond, impossible de rouler assez vite pour ne pas m’enfoncer sans me faire de grosses frayeurs. En fin de matinée, je rattrape mes compatriotes et continue un moment avec eux avant de les perdre dans un oued de plusieurs kilomètres de sable profond. Ici, pas d’autre solution que de mettre son cul le plus en arrière possible et de rouler avec les gaz à fond. Il faut au moins atteindre 60 km/h pour ne pas rester planté, dis comme ça, ça paraît facile, mais je vous assure que c’est physique quand la moto balance dans tous les sens.
A la sortie du oued, j’aperçois un petit village avec des enfants qui me font signe, du coup je sors et pars dans la direction qu’ils semblent m’indiquer.
Après quelques centaines de mètres sur un minuscule sentier, je me rends compte que je suis parti dans la fausse direction et que je dois retourner en arrière. Je m’arrête pour vérifier mon GPS et je décide de suivre un petit chemin qui contourne la colline pour repartir vers le village quand soudain je me fais désarçonner de la moto qui continue tout droit et moi, une fois à terre, je réalise avec horreur que je viens de me prendre un fil barbelé au cou. Je ne l’ai absolument pas vu, il a du être soulevé par le carénage de la moto avant de m’arriver au cou. Je me relève et mets les mains autour de mon cou, Quand je vois le sang sur mes gants, je panique... J’en ai pour combien de temps ? Je vais mourir ? Personne ne va me trouver ici, il faut que je retourne au village !
En état de choc, et incapable de voir la gravité de la plaie, je me contente de me tenir le cou et je commence à courir dans la direction du village avant de reprendre mes esprits et d’appeler l’assistance médicale avec mon téléphone marocain en leur indiquant ma position approximative sur le roadbook.
Entre-temps, j’aperçois deux 4x4 venant dans ma direction. Je leur fais des grands signes et ils viennent vers moi. Ils m’enlèvent le casque, le neck-brace et regardent la plaie qui fait quasiment tout le pourtour de mon cou. Par chance, ce n’est que superficiel, mon tour de cou en tissu m’a protégé, il est troué de partout. Le véhicule médical arrive une dizaine de minutes plus tard et Clémentine, l’infirmière, me prend en charge. Elle me dit que j’ai une chance inouïe de me retrouver avec si peu de dégâts... Elle me désinfecte et me pose un gros bandage qui ne tient pas très bien avec ma barbe et la transpiration.
Un deuxième pickup charge ma moto et moi je monte dans le 4x4 médical. Alors que l’on s’apprête à partir, j’observe dépité les locaux rapidement apparus de nulle part après l’accident, replanter le piquet que j’ai arraché à la force de mon cou. Quelle idée de mettre un barbelé en travers d’un chemin !
Une journée chargée pour l’équipe médicale aujourd’hui. Juste avant moi, un motard s’est ouvert la main lors d’une chute et quelques minutes après mon accident, un side-by-side a fait onze tonneaux. Il paraît qu’il est détruit et on pense que le pilote est sérieusement blessé. Une autre équipe médicale est déjà en route. Sur le raid, il y a au total six pickups médicaux avec chacun un médecin réanimateur et une infirmière urgentiste. Je n’avais pas l’intention de tester leur efficacité, mais puisque c’est le cas, je dois dire qu’ils ont été très rapides pour arriver sur les lieux de l’accident.
Ensablement, pneu éclaté, assistance à un autre 4x4 en panne, etc. En temps normal, j’aurais considéré ce trajet comme une galère absolue, mais là, tout ce qui m’importait c’était d’être en vie.
C’était intéressant de vivre le raid du point de vue de l’équipe médicale le temps d’une journée. J’ai appris beaucoup de chose après 10 heures en compagnie de Marcel et Chloé. Si nos journées sont éprouvantes, les leurs sont également loin d’être de tout repos. Ils sont tous les jours avant nous sur la route et ne rentre qu’une fois tous les participants de retour. Ils sont tous bénévoles et le plus fou dans cette histoire, c’est qu’ils sont nombreux à dédier chaque année leurs vacances au Raid Passion Désert pour que des gars comme nous puissions aller faire mumuse dans le bac à sable.
On arrive peu après 22h00 à l’hôtel, juste à temps pour se servir un repas bien mérité au buffet. Malgré moi, je suis devenu un peu l’attraction de la soirée avec ma mésaventure, j’aurais préféré que ce soit pour quelque chose de plus glorieux.
Les deux concurrents qui ont eu l’accident en side-by-side seront évacués vers la France demain matin. J’ai trouvé bien l’attitude de l’organisation et des médecins qui jouent la transparence et nous tiennent informés des accidents et de ce qu’il advient des blessés. Il n’y en a pas eu tous les jours, mais sur toute la durée du raid, plusieurs personnes ont quand même dû être rapatriées et le tout a été fait très rapidement.

Etape 7 : Zagora-M’Hamid 171 kilomètres

Mes blessures n’étant pas profondes, je me fais entourer le cou de bandage et je prends le départ de la 7ème étape, qui par chance est assez courte. La première moitié fut très éprouvante. Une piste avec d’énormes cailloux, je n’arrive pas à trouver le bon rythme pour ne pas me faire des frayeurs. Les suspensions de ma Rallye sont tellement dures, que je sens chaque caillou, c’est vraiment cassant.
La second partie de l’itinéraire devient sablonneuse et on a droit à de petites dunes. Ça passe déjà mieux. A mon arrivée au camp, je suis assez rassuré d’apprendre que beaucoup ont galéré sur la première partie, à part mes collègues suisses-allemands qui ont pris la piste à plus de 100km/h.
C’est notre seconde soirée dans un campement berbère, au milieu du désert et je trouve que c’est une excellente idée de la part de l’organisation d’inclure ce type de campement. Le dépaysement et l’authenticité de l’endroit valent bien une nuit avec un peu moins de confort.
A nouveau, les organisateurs nous préparent un apéro accompagné par des musiciens berbères avant qu’on se mette à table. Une soirée inoubliable.

Etape 8 : M’Hamid-Zagora 213 kilomètres

Aujourd’hui, on attaque la seconde étape de grosses dunes. Je pars seul jusqu’au premier checkpoint. La piste sablonneuse est difficile, il y a énormément de vent et on n’y voit pas grand-chose. Quand j’atteins le premier checkpoint, j’apprends que l’organisation a décidé de stopper temporairement l’étape par sécurité. Après une heure d’attente, on nous annonce que la boucle dans les dunes est annulée et qu’il faut rejoindre le prochain bivouac. Beaucoup de participants sont déçus. Moi, pour être honnête, je suis un peu rassuré, j’ai déjà eu mon lot d’émotions sur ce raid. Du coup, je repars directement jusqu’à Zagora par une jolie piste et j’arrive tôt et pas trop cassé à l’hôtel. Ça fait du bien, parce que mine de rien, après huit jours, la fatigue commence à se faire sentir.

 

Etape 9: Zagora-Ouarzazate 250 kilomètres

Dans le désert, il ne pleut quasiment jamais. Sauf aujourd’hui, bien entendu, pour la première fois de l’année ! Oui, vous avez bien lu, il pleut ici à Zagora, aux portes du désert.
Hier soir, trop occupé à discuter avec une jolie nana, j’oublie d’aller faire le plein. Du coup, ce matin, c’est finalement en dernier, avec 45 minutes de retard que je peux repartir, après avoir galéré pour trouver une station d’essence qui fonctionnait, alors qu’il y avait une panne d’électricité dans la ville.
Il pleut fort et je ne vois rien du tout à travers mon masque. La piste est détrempée, il y a plein de cailloux glissants, je n’ose pas aller trop vite... Soudain, bam ! Sur un tronçon de terre, je glisse et me retrouve à terre. Plus de peur de que mal, mais je suis plein de boue de la tête aux pieds. Je n’arrive plus à nettoyer mon masque en roulant avec mes gants pleins de boue et je suis obligé de l’enlever pour y voir quelque chose et me fait fouetter la gueule par les gouttes de pluies... J’ai froid, je suis trempé, je me sens assez misérable.
Au premier checkpoint, je croise Luc, un jeune enduriste français avec qui je partage ma chambre d’hôtel. On mange 2-3 merguez à l’abris d’une tente préparées par les gens du premier cehckpoint avant de partir pour le deuxième. Comme Luc voulait essayer ma moto, on se les échange et je continue la route avec sa vieille Honda XR400. C’est l’opposé absolu de ma KTM Rallye. Elle est basse, légère, les suspensions sont molles, la selle est tellement confortable qu’on a envie de rouler assis tout le temps et ce petit moulin à air est tout à fait génial pour moi.
Il arrête enfin de pleuvoir et je continue tranquillement mon bout de chemin au guidon de cette petite moto avec laquelle je prends énormément de plaisir, plus qu’avec ma Rallye tellement elle est souple et facile à emmener. Une moto conçue pour gagner le Dakar n’est pas forcément la plus adaptée aux mains de monsieur tout-le-monde, mais ça j’en étais conscient en l’achetant... En fin de journée, quand je revois Luc, il est aux anges. Lui qui fait du motocross depuis son plus jeune âge me dit qu’il s’est régalé comme jamais au guidon de ma KTM.
A l’heure du briefing, Yves, le boss du Raid Passion Désert nous annonce que les intempéries ont coupé tout accès entre Ouarzazate et Marrakech et que l’étape de demain devra probablement être annulée. Plusieurs 4x4 ont été envoyés en reconnaissance pendant la nuit et nous aurons plus d’informations demain matin, mais très certainement on devra passer par Agadir.

Etape 10 : Ouarzazate-Marrakech 630 kilomètres

Les nouvelles ne sont pas bonnes, la route étant toujours coupée, nous sommes obligés de passer par Agadir, c’est-à-dire 630km de route !
Il fait beau, la première partie jusqu’à Agadir est charmante avec plusieurs jolis cols. On s’arrête pour un bon repas de midi avec tous les autres Suisses avant de continuer la route pour rejoindre Marrakech en fin d’après-midi. Le camion qui transporte nos affaires n’arrive qu’en début de soirée, on est condamné à rester dans nos tenues de power rangers.
Pour cette dernière soirée, une remise des prix a lieu, par catégorie et par groupe. Ceux qui le désiraient pouvaient prendre part au classement au moyen d’un transpondeur qui est récupéré chaque soir par l’organisation. Le meilleur est celui qui a le kilométrage le plus proche de la trace originale. Le concept est bien pensé, mais la précision du transpondeur donne des résultats qui sont parfois bizarres. Certains jours, alors qu’on a toujours roulé ensemble et exactement le même tracé, il y avait de gros écarts dans notre team au classement. Le team suisse termine en deuxième position, malgré mes pénalités pour la journée que je n’ai pas terminée, et Chris et Werni reçoivent chacun un prix.
Un buffet apéro suit la remise des prix avant qu’on se mette à table et qu’on termine la soirée avec des petits shots de vodka sur le parking de l’hôtel.
Le Raid Passion Désert offre tout ce qu’un amateur pourrait rêver d’un rallye, sans le côté compétition et pour un budget abordable. Mais surtout, il y règne une ambiance vraiment chaleureuse et décontractée. Nombreux sont ceux qui reviennent chaque année et je comprends pourquoi.
Malgré une situation de dernière minute nécessitant la modification des deux premières journées, l’annulation d’une partie de la huitième journée pour cause de tempête et de la dernière étape pour cause d’inondation, je suis totalement satisfait de mon raid. Dix jours, c’est vraiment beaucoup. Du coup, qu’on ait perdu la dernière journée à faire de la route ne m’a pas plus dérangé que ça.

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